Thaïlande / Partie 7 : Une semaine chez les éléphants
janvier 08, 2022Contexte et préjugés
Un grand classique lors d'un voyage en Thaïlande est de partir à la rencontre des éléphants. Près de 50 000 éléphants d'Asie vivraient aujourd'hui à l'état sauvage, mais c'est au cœur de parcs ou "sanctuaires" que l'on peut les découvrir, en captivité.
Si nous avons eu la chance d'en croiser dans le nord (où se concentrent la majorité des centres) au hasard d'un virage, c'est à proximité de la ville de Kanchanaburi, à l'ouest de Bangkok, le long de la mythique rivière Kaew (connue pour la construction du chemin de fer Thaïlande/Birmanie par l'armée japonaise lors de la seconde guerre mondiale), que nous avons posé nos sacs à dos pour passer près d'une semaine au sein d'un lieu pas comme les autres !
Ce lieu, c'est Baan Mama, chez Brigitte (alias Mama), une belge installée en Thaïlande depuis des années.
Après avoir travaillé dans la restauration, puis quelques temps auprès des éléphants dans d'autres parcs, elle a décidé en 2019 (juste avant le covid comme elle s'en amuse !) de lancer sa propre affaire. En effet, la condition de vie des éléphants dans les grands centres dits "éthiques" l'a profondément dégoûtée, et elle a souhaité créer un centre à son image. A savoir un centre simple, à taille humaine, où les animaux et leurs mahouts sont bien traités, et où les visiteurs peuvent - en toute transparence et sans artifices - les découvrir et en apprendre davantage sur leur histoire et sur leur vie !
Et des choses, nous en avons appris plein ! Nous avons pu sortir de tous les préjugés que nous pouvons avoir en occident.
Il y aurait des tonnes de choses à dire, mais voici ce qui nous semble être le plus important à partager :
- Non, en Asie et plus particulièrement en Thaïlande, les éléphants ne sont pas (ou tout du moins plus), en règle générale, battus ou maltraités. Un éléphant domestique, en Thaïlande, c'est un animal mais c'est aussi un "capital", un "héritage" transmis au sein d'une famille. Suivant son sexe et son âge, un éléphant peut "peser" jusqu'à plusieurs dizaines de milliers d'euros, ce qui représente en Thaïlande le prix d'un appartement ou d'une maison. Un propriétaire d'éléphant n'a strictement aucun intérêt à battre ou à maltraiter son éléphant puisque c'est sa plus grosse richesse, et souvent son gagne pain. En effet, le propriétaire de l'éléphant peut être son "mahout" - et ainsi travailler au quotidien et gagner sa vie grâce à l'animal - ou bien le "louer" à un refuge, et ainsi obtenir une rente lui permettant de vivre tous les mois.
- Non, les éléphants domestiques ne peuvent pas être relâchés dans la nature pour qu'ils puissent retrouver leur liberté. Un éléphant domestique n'a plus peur de l'homme, seul en liberté il détruirait des champs, visiterait des villages ou des maisons. Un éléphant domestique porte également sur lui des maladies (herpès par exemple), car étant au contact de l'homme, qu'il pourrait transmettre à des éléphants sauvages qui en décèderaient, car non protégés face à ces maladies. Un éléphant domestique vit aussi plus vieux (jusqu'à 70 ans environ) qu'un éléphant sauvage car son alimentation est adaptée. Relâcher un vieil éléphant dans la nature, c'est le condamner à mort assez rapidement !
- Non, monter sur le dos d'un éléphant n'est pas dangereux ou douloureux pour lui. Un éléphant dépasse aisément les 3 tonnes. Pour un éléphant, porter un être humain de 70kg, c'est comme porter un petit chaton sur nos épaules. De plus, lorsque l'on monte sur un éléphant, on s'avance sur sa nuque où les muscles sont renforcés. Un éléphant se rend à peine compte qu'on monte sur lui ! Contrairement à un cheval qui porte un cavalier, par exemple...
C'est en revanche le fait de tourner en rond toute la journée sur des petites distances qui est dangereux dans les camps proposant aux touristes des balades à dos d'éléphants, ce n'est pas le fait même de monter dessus.Chez Baan Mama, on peut monter sur le dos d'un éléphant mais uniquement si le mahout ET l'éléphant sont d'accord. Si l'éléphant refuse de donner sa patte pour faire monter le visiteur, ou bien si le mahout ne le sent pas, on s'arrête là et on ne force pas. C'est un refuge, pas un parc d'attraction. Et ce sont des animaux, pas des jouets !
- Non, l'éléphant sauvage d'Asie n'est pas en voie de disparition, en Thaïlande tout du moins. Le trafic d'ivoire est encadré, la découpe des défenses ne peut se faire que sous contrôle vétérinaire, et du ministère dédié, lorsque celles-ci deviennent trop longues et dangereuses pour l'animal. Le propriétaire se voit alors remettre un "certificat" adossé à la défense, permettant d'assurer la traçabilité de l'ivoire. Quant aux éléphants en tant que tel, ils sont "pucés", ce qui permet de les suivre de leur naissance à leur mort. Capturer un éléphanteau sauvage est rendu, légalement, impossible, puisqu'un propriétaire doit pouvoir présenter sa mère pour pucer l'éléphanteau. Au moment du "puçage", les ADN des deux animaux sont comparés suite à un prélèvement sanguin. Les contrôles sont assez réguliers et permettent d'assurer, en Thaïlande tout du moins, un bon suivi des éléphants domestiques et sauvages, et de maintenir leur population.
- Non, le "dagot", sorte de crochet utilisé par le "mahout" pour se faire obéir par son éléphant, n'est pas fait pour faire mal à l'animal. Il est en réalité très peu utilisé, l'éléphant étant dressé pour obéir avant tout à la voix de l'homme. Si nécessaire, le mahout n'a qu'à rapprocher le "dagot" de l'animal, voire l'apposer contre sa peau. La pointe n'est utilisée qu'en dernier recours (danger pour l'homme, un autre animal, ou l'éléphant lui-même), et ne représente pas plus de douleur qu'une simple piqûre de vaccin dans le bras d'un homme. Les centres qui prétendent ne pas utiliser de "dagot" mentent ou mettent en danger leurs employés et visiteurs ! Chez Baan Mama, quand un mahout fait tomber sans faire exprès son dagot par terre, l'éléphant le récupère avec sa trompe pour lui rendre : c'est-à dire à quel point cela les traumatise !!
- Non, les grands refuges et centres très réputés et actifs médiatiquement ne sont pas forcément toujours si "éthiques" qu'on le croit.Certains (mais pas tous heureusement !) sont de véritables "usines". Ils assurent fièrement avoir plus de cent éléphants, mais en regardant de plus près on n'en voit qu'une vingtaine ou trentaine grand maximum en les visitant. Les autres étant enchaînés, et n'étant là que pour rapporter de l'argent, au travers de systèmes invitant les internautes à "parrainer" un éléphant pour le "sauver" et le nourrir. Ils mangent trop, ou pas assez, ne bougent pas assez, et finissent par avoir des problèmes de santé. Et quand ils décèdent, le centre peut remettre la cause sur leur triste passé, et assurer qu'il leur a offert une fin de vie heureuse...Ces systèmes de dons et de parrainages rapportent énormément aux grands centres qui dégagent des profits colossaux (même en période de covid !), d'autant plus qu'ils fonctionnent en accueillant des éco-volontaires par centaines. Les centres cherchent à acheter des éléphants dans l'idéal vieux et "abîmés" pour susciter la pitié de leurs visiteurs et ainsi obtenir leurs parrainages. Un éléphant vieux et abîmé coûte plus cher qu'un jeune en bonne santé !!Ces centres assurent également que les éléphants ne sont jamais attachés, et parfois même qu'ils sont laissés en liberté la nuit, ce qui est d'une part impossible (ils ne reviendraient pas, attaqueraient des plantations, des villages, etc.), et est d'une autre part totalement illégal.Ils revendiquent également que les mahouts ne portent pas de "dagot" : quand c'est effectivement le cas, le mahout porte en réalité dans sa main un couteau ou une lame. Ne pas porter de "dagot" est également dangereux pour le mahout (près d'une quinzaine de mahouts tués par des éléphants en dix ans dans un centre très connu du pays...) ainsi que pour le visiteur.Plus le temps passe et plus les propriétaires refusent de "louer" leurs éléphants à ces centres par peur de les récupérer en mauvais état. C'est pourquoi les centres doivent de plus en plus les acheter, ce qu'ils peuvent faire sans soucis grâce à leur puissance financière.
→ il fut très intéressant et enrichissant d'obtenir toutes ces informations qui vont totalement à l'encontre de ce que l'on peut croire et entendre en occident ! Le tourisme "éco-responsable" est plus que jamais à la mode et les grands centres jouent sur cette vague en bernant leurs visiteurs. Chez Baan Mama, on s'attache à remettre les choses au clair et à être totalement transparent sur le traitement des éléphants. La petite taille de la structure permettant de s'y intégrer pleinement et de pouvoir assister, en toute transparence, à la vie quotidienne du refuge, à voir ses forces et ses limites.
Baan Mama
Parlons maintenant un peu plus de Baan Mama !
Le cadre est magnifique, à quelques kilomètres de la ville de Kanchanaburi, à 2 heures de route de Bangkok, au milieu de collines et de prairies verdoyantes. La rivière Kaew, où les éléphants aiment se baigner, s'écoule aux pieds du complexe. Il s'agit d'un ancien resort qui, bien que construit récemment (il y a une quinzaine d'années), a été laissé à l'abandon. Plusieurs bâtiments et 23 logements occupent le site, mais seuls quelques uns sont encore utilisés. Le lieu est immense et laisse de la place aux animaux pour évoluer. Des forêts, prairies et champs sont situés à proximité pour promener les animaux et leur fournir de quoi se nourrir.
"Mama" avait pour idée initiale de créer une sorte de "maison de retraite pour éléphants". Les opportunités, hasards des rencontres, des naissances, et le prix élevé des éléphants âgés (voir plus haut !) font qu'elle se retrouve désormais avec toute la pyramide des âges 😊
La philosophie du lieu est de récupérer des éléphants et de les faire vivre convenablement, avec les moyens du bord, jusqu'à leur mort, tout en sensibilisant les visiteurs sur la question animale.
Pas de folles ambitions, quatre éléphants suffisent actuellement à Mama, et pas plus d'une dizaine de "clients" par jour (entre les visiteurs à la journée et les éco-volontaires). Le terrain serait de toute façon trop petit pour accueillir confortablement plus d'animaux.
A l'avenir, quand l'activité reprendra de plus belle, Mama a pour rêve de mettre assez d'argent de côté pour acheter un grand terrain, entouré d'une épaisse clôture en béton armé, sur lequel les animaux pourraient rester davantage en liberté. Aujourd'hui, ils doivent en effet rester attachés par une chaîne le midi et la nuit, quand leur mahout se repose.
La chaîne est avant tout un objet symbolique puisque l'éléphant peut sans problème la briser (et c'est déjà arrivé chez Baan Mama !). Elle ne lui fait pas mal, n'étant pas trop serrée, et est surtout là pour faire comprendre à l'animal qu'il ne doit pas bouger de son emplacement. Et elle ne l'empêche pas de marcher un peu, de se retourner ou encore de se coucher. Elle est d'autant plus indispensable que le voisinage a déjà menacé de tirer sur les animaux suite à des "visites" nocturnes indésirables... (et le droit est avec eux ! on peut tuer un éléphant domestique pour se défendre s'il vient chez nous).
Le "mahout" est en quelque sorte à la fois le "guide", le "dresseur", le "maître" ou encore le "soigneur" de l'éléphant. Chez Baan Mama, chaque éléphant a un mahout, et chaque mahout n'a qu'un seul éléphant. Certains les suivent depuis leur enfance et ont grandi ensemble. Il existe un véritable lien unique entre l'homme et son animal. Cela présente des avantages, avec une confiance et une parfaite connaissance mutuelle, mais aussi parfois des inconvénients quand un mahout doit s'absenter ! L'éléphant peut alors avoir du mal à suivre et obéir aux ordres d'un autre mahout.
Le mahout dirige avant tout son animal par la parole et le "dagot", comme expliqué précédemment, est surtout symbolique, bien qu'indispensable en cas d'incident.
Parlons un peu des éléphants maintenant puisque nous sommes là pour eux !
D'abord, quelques détails et chiffres étonnants qui permettent de mesurer la démesure de cet animal :
- Qui dit éléphant dit trompe ! Une trompe d'éléphant, c'est plus de 40 000 muscles. A titre de comparaison, un homme compte moins de 700 muscles dans... tout son corps !- Un éléphant, pesant dans les 3 tonnes, doit manger chaque jour 10% de son poids. Il doit boire également autour de 80L, ce qui représente 7 à 8 "trompes". Oui, on compte en trompe puisqu'un éléphant boit en remplissant cet organe, qui fait autour de 12L de contenance, avant d'expédier en une fraction de seconde son contenu dans sa gueule ! Lorsque l'animal se fait vieux, il ne boit plus assez car il ne ressent pas la soif (comme chez les humains !). Chez Baan Mama, on leur donne alors des aliments forts en sel pour "forcer" cette sensation de soif, ainsi que des troncs de bananiers riches en eau.- Un éléphant ne possède que quatre dents qui ne repoussent que cinq fois dans la vie de l'animal. Lorsque les dents ne repoussent plus, quand l'animal se fait vieux, celui-ci n'arrive plus à se nourrir correctement car il ne peut plus assez "mastiquer" ses aliments pour profiter de leurs calories. C'est pourquoi un éléphant sauvage décède plus jeune qu'un éléphant domestique qui, lui, a la chance de bénéficier d'une alimentation adaptée.- Les oreilles de l'éléphant d'Asie sont plus petites que son cousin d'Afrique. Les oreilles de l'éléphant sont riches en vaisseaux sanguins, et c'est ainsi en les agitant que l'animal peut se rafraîchir en ré-oxygénant son sang. En Afrique, il fait non seulement plus chaud, mais les animaux vivent également dans la savane où l'ombre est moins présente : ils ont ainsi des oreilles plus grandes pour pouvoir se rafraîchir davantage, la nature est bien faite !- Contrairement aux éléphants d'Afrique, seuls les mâles possèdent des défenses chez les éléphants d'Asie (en réalité, les femelles peuvent en posséder mais elles restent très petites).- En Asie, un éléphant va mesurer autour de 2.5m de haut. Leurs cousins africains mesurent près d'un mètre de + !- Le sexe d'un mâle peut mesurer jusqu'à plus de deux mètres. Quand il éjacule, ce sont 1.8L qui sont expédiés !
Dans la joyeuse troupe de Baan Mama, on compte aujourd'hui quatre éléphants.
- La doyenne, Tao, 62 ans environ (à l'époque il n'y avait pas de puce, et son propriétaire, lui aussi âgé, ne se souvient pas parfaitement de son année de naissance 😁) et 2.6 tonnes. C'est la plus petite, en termes de carrure, des trois adultes. Avant Baan Mama, elle était maltraitée dans des camps à nacelles. Si ses débuts au refuge ont été compliqués, elle est maintenant la préférée des visiteurs. Une vraie "force tranquille", l'animal le plus facile à approcher bien qu'elle ne soit pas une grande fan des caresses, et qu'elle aime tourner la tête quand un appareil photo est de sortie ! C'est l'animal avec qui on peut passer le plus de temps grâce à son caractère "facile". Son très sympathique mahout, "Tee", parle également un peu français ce qui facilite les échanges. En son absence, c'est le jeune "Win" qui prend le relais. Il s'occupe aussi de l'entretien général des emplacements, et de la nourriture. Enfin, elle est très facile à "monter". Elle sert même les oreilles quand on est sur son dos pour nous assurer une stabilité ! Son alimentation est adaptée à son vieil âge, avec notamment des boulettes de riz au manioc très salées le midi pour la forcer à boire. Elle ne boit bien souvent que 40L ce qui n'est pas assez, il faut alors quotidiennement l'encourager à boire au moins 5 ou 6 trompes. Mama espère qu'elle pourra vivre encore une belle dizaine d'années. Elle fera tout pour la conserver au refuge jusqu'à ses derniers jours, quitte à devoir se séparer des autres éléphants en cas de difficultés financières.
- Douilledouille, 28 ans, 3.6 tonnes. Elle a grandi avec son mahout "Chai". Elle est câline. En revanche, si elle se laisse monter sur le dos, contrairement à Tao c'est plus sportif ! Elle ne sert pas les oreilles pour assurer notre stabilité, et se comporte comme si nous n'étions pas sur elle : tu veux monter, tu assumes maintenant coco ! Maëlle n'a pas voulu essayer 😂
- Tami, 26 ans, 3.2 tonnes. Elle a également grandi avec son mahout "Paan", le frère de "Chai", qui vit avec elle depuis qu'elle a deux ans. Il en résulte une incroyable complicité entre ces deux là. Tami est très peureuse et est ainsi en quelque sorte la plus "dangereuse" du groupe. En effet, un simple bruit d'engin, ou la simple vue d'une chèvre peut lui faire peur, ou même d'une poule (oui oui, on a assisté à ce spectacle) !! Et quand elle a peur, elle arrive à effrayer ses camarades et il peut devenir dangereux d'être au milieu de la troupe 😁. On évite donc de monter sur le dos de Tami !
- Et enfin, la véritable star de la troupe, le petit dernier, Chuchai (prononcer "Tchoutchai") ! A seulement 10 mois, il assure le show. Il est né au sein même du refuge, c'est le fiston de Tami mais il aime suivre et embêter Douilledouille. Il enchaîne les bêtises, suce encore sa trompe avec son jeune âge, adore se baigner et éclabousser autour de lui, ou courir après les visiteurs. Quand sa maman Tami s'éloigne trop, il se met à crier et se lance à sa recherche, en panique ! Il n'aime pas trop les hommes et tente de les "gifler" avec sa trompe, même si Thomas a réussi à créer une petite "relation amicale" avec lui au fur et à mesure des jours 😊 On a adoré joué avec sa trompe qui manque encore un peu de force (surtout quand il se réveille de la sieste) ! Ce beau gros bébé pèse aujourd'hui 300kg tout de même, et il ne se rend pas encore compte de sa force, étant encore plus petit que les humains. Il devra malheureusement d'ici quelques semaines être attaché par une chaîne la nuit pour sa propre sécurité et celle des autres (il a déjà réussi à fuguer le coquin). En attendant, il continue à apprendre tous les jours par mimétisme, que ce soit pour manger avec sa trompe comme sa mère, ou pour ouvrir les robinets d'eau comme les humains ! Son mahout sera à termes le fils de "Paan", qui a aujourd'hui 4 ans seulement. C'est assez marrant de voir ces deux petits grandir et courir ensemble !
Et comme ça ne suffit pas, Baan Mama c'est également 18 chats (qui restent bien cachés pour la plupart), 10 chiens adorables et extrêmement câlins, des poules, des coqs et quelques varans. Des serpents sont également régulièrement aperçus.
L'éco-volontariat chez Baan Mama
Le décor étant bien planté, place maintenant à notre intervention chez Baan Mama. Notre semaine sur place s'est inscrite dans un programme d'éco-volontariat. Concrètement, en échange d'une participation financière raisonnable et d'un peu de travail, nous sommes logés et nourris au sein du refuge et avons le privilège de vivre au contact des animaux.
C'est la formule idéale pour bien s'imprégner du lieu et comprendre, en toute transparence, comment il fonctionne. C'est également l'option parfaite pour apprendre à découvrir en profondeur les éléphants, rencontrer les mahouts, participer à leur quotidien, apporter sa pierre à l'édifice et en ressortir moins "bête" (voir la partie "Contexte et préjugés" en début d'article).
C'est aussi l'occasion, au milieu d'un "long voyage", de se poser un peu, de prendre son temps et de rencontrer du monde au sein d'une véritable petite "famille" 😀
Pour le bien des éléphants et pour des aspects pratiques et logistiques, le quotidien est très routinier.
Tout démarre par un bon petit dej vers 8h du matin, avec des œufs, crêpes et toasts à tartiner avec le délicieux "chocolat / coco" dont Mama a le secret 🤤
Arrive ensuite Tao, avec son mahout Tee. Elle vient de son "emplacement" pour la nuit jusque devant la cuisine pour son petit dej. Au programme des fruits, et notamment de l'ananas. On lui en donne une belle dizaine, qu'elle avale goulument après avoir arraché les feuilles avec sa trompe (madame est difficile avec son vieil âge 🧓). Comment donne-t-on un ananas à un éléphant ? Et bien simplement en lui glissant dans le creux de sa trompe !
Quand Tao a terminé, elle s'en va se promener et les trois autres arrivent. Tao est assez "asociale" et préfère rester seule, c'est pourquoi elle reste séparée de ses colocataires.
Si Tao est une vraie "force tranquille", c'est un autre délire avec Tami, Douilledouille et Chuchai qui débarquent pratiquement au galop. Il ne manque plus qu'une musique héroïque de film et le décor est planté, un vrai spectacle chaque matin auquel on ne perd pas une miette 😍.
Les grosses têtes et trompes des deux grandes viennent demander énergétiquement les ananas qu'elles dévorent entièrement en une fraction de seconde. Pas le temps de se reposer, sinon Tami nous rappelle à l'ordre par un cri d'impatience. Pendant ce temps, Pan, le mahout, en découpe des plus petits morceaux pour Chuchai, encore trop jeune pour se nourrir seul. Il boit aussi encore le lait de sa maman ! Quand les animaux ont terminé de manger, place pour eux aussi à une petite balade après avoir bu quelques trompes au jet d'eau.
Suivant les jours, on file se promener avec les éléphants (en choisissant son camp : Tao VS le trio) ou bien on monte nettoyer les "emplacements". Les emplacements, c'est l'endroit où les bestioles sont attachées pour la nuit et pour la pause du midi.
Tao et Douilledouille possèdent un emplacement dédié tandis que Tami et son fiston sont ensemble.
Tao possède plus exactement deux emplacements, un à l'ombre le midi et un autre pour la nuit, la classe pour la préférée de Mama !
Nettoyer l'emplacement revient à retirer, au râteau ou directement à la main, les crottes 💩 et le reste de la nourriture de la veille.
Les crottes, qui ne sentent rien (le transit de l'animal étant très rapide) mais sont assez lourdes et volumineuses, sont mises de côté sur des tas dédiés, pour être ramassées régulièrement par un voisin qui les utilise comme un engrais (il paraît que c'est ultra efficace !).
Les restes de nourriture (des feuilles et bouts de troncs de bananiers) sont également mis sur des tas que l'on va de temps en temps décharger, via un pickup, dans des champs.
Comme Tao est difficile, c'est elle qui a le plus de restes à nettoyer !!
On a ensuite un peu de temps libre avant le déjeuner. On peut se reposer, ou bien donner un coup de main : vaisselle, nettoyage de la terrasse, des parties communes, préparation des chambres des futurs arrivants, rangement... Il y a de quoi s'occuper sans non plus trop se fatiguer, et c'est toujours valorisant de se sentir utile !
On peut aussi accompagner les mahouts pour chercher de la nourriture, à savoir des troncs de bananiers et des hautes herbes appelées ici "herbes à éléphants". Aux mahouts la machette et aux éco-volontaires la tâche de charger l'arrière du pick-up !
Pour les troncs et feuilles de bananiers, on file dans les champs aux alentours du refuge se servir gracieusement. Ces plantes poussent très vite et sont de véritables "mauvaises herbes", le deal consistant à les récupérer pour nourrir les animaux arrange tout le monde dans le voisinage ! 🍌
Pour les "herbes à éléphant", Mama paie actuellement la découpe des herbes à l'hectare. Elle est en train de récupérer des terres pour faire ses propres plantations.
Pour le déjeuner, on file dans un petit resto local à deux pas de là, sur la route, manger un bon Pad Thai. L'occasion aussi d'assister au quotidien de Mama qui, en plein repas, va par exemple arrêter le pick-up d'un agriculteur pour lui acheter tout son stock de 300kg d'ananas (qui tiendront deux jours et demi...) ! Ici, en Thaïlande, tout semble plus "simple" et naturel 😊
Au retour au refuge, il est temps de préparer le déjeuner de Tao. Madame est vieille, elle a donc le droit à une alimentation adaptée. Au programme : un autocuiseur entier de riz, une grosse boîte de sel et trois de farine de manioc ! On mélange le tout à la main, on forme une douzaine de grosses boules pour Tao, et on en garde quelques autres pour Tami et Douille douille, qui n'ont pas besoin de cette alimentation, mais sont jalouses si elles n'en ont pas 🙃
Tao arrive alors nous donner sa trompe pour qu'on l'a serve. Le sel présent dans les boulettes a aussi pour but de stimuler sa soif pour la faire boire, comme elle se fait vieille ! Après Tao, place comme le matin aux trois autres de la bande, qui récupèrent quelques boulettes et encore un peu de fruits pour la route.
L'après-midi, c'est promenade.
L'option une, c'est la balade tranquille avec Tao. L'occasion de monter un peu sur son dos pour prendre de la hauteur !
La balade permet de sortir du refuge, d'aller marcher un peu dans la forêt et la brousse autour, puis de se poser une petite demie heure pendant que madame va chercher à manger, sous la surveillance de Tee. Les chiens du refuge et notamment Bridget, la préférée de Thomas, aiment venir nous accompagner et nous demander des câlins pendant ces promenades 😍
La deuxième option est plus sportive : partir avec Tami, Douille douille, et le petit fou. Là on se repose moins mais on rigole bien aux bêtises du gros bébé, qui essaie parfois de nous courser ! On peut aussi monter sur Douilledouille même si peu osent ! En effet Mama vend mal la balade, il faut avoir le goût du risque 😂
Thomas aura tout de même tenté sans encombre (*) même s'il faut s'accrocher davantage, la bestiole n'ayant rien à faire d'avoir quelqu'un sur elle !
* après renseignement, les assurances voyages ne couvrent bien entendu pas les accidents à dos d'éléphant ! Prenez vos précautions !
En fin de promenade (et/ou avant, c'est selon) les animaux passent à la douche ! Tuyau d'arrosage ou coups de trompes pour les grandes, et baignade complète pour le petit dans sa grande bassine, qui sera d'ici peu trop petite pour lui ! Ce qui est frustrant, c'est qu'après la douche la bestiole se balance de la terre partout sur le corps !! C'est pour emprisonner dans la poussière des parasites et petites bêtes, lesquelles seront évacuées à la prochaine douche 😀
En temps normal, les éléphants vont régulièrement se baigner directement dans la rivière. Cependant, avec l'arrivée du petit dernier, cette activité est mise en pause car il serait emporté par les courants. Il fait également encore un peu trop "froid" dans l'eau à cette période. Les baignades reprendront au printemps prochain quand Chuchai aura pris un peu de poids et de force 😊
Quelques petites trompes d'eau dans la bouche pour se rafraîchir, et il est déjà temps pour les animaux de retourner à leur emplacement pour la nuit.
On retourne alors chercher à manger rapidement avec les mahouts. Enfin, dans les faits, c'est surtout Thomas ! Maëlle elle va plutôt prendre une bière avec Mama 😂
On n'oublie pas également de passer à l'épicerie du coin, chez "Harry Potter" (en référence aux lunettes du gérant), acheter des bières pour l'apéro 🍻
La soirée commence alors : repos, kayak sur la rivière Kaew pour admirer le coucher du soleil, baignade pour certains, apéro à base de bière ou de rhum, puis place à l'excellent repas préparé par Mama. Pizzas, burgers, pâtes carbo, charcuterie / fromage,... On se régale ici en retrouvant un peu de cuisine occidentale ! Et ça fait du bien !!
Ces moments de vie font partie intégrante de la vie chez Baan Mama.
Brigitte est une personne infiniment généreuse avec qui on aura pris énormément de plaisir à partager. On s'est de suite sentis chez nous.
On a également eu l'occasion de rencontrer tout un tas de voyageurs au long cours : notamment cette famille de Toulousains, partie l'été dernier et qui va rentrer en France pour le début du mois de mars. Ou encore Maeva et Kylian, venant d'Aix en Provence, 27 ans, qui sont partis début septembre sans date de retour précise, et qu'on prendra grand plaisir à recroiser en France.
On aura également rencontré et accompagné des visiteurs à la journée, comme Clément et Lize, où encore Cécile et Romain qui seront restés dîner sur place tant ils ont aimé l'expérience.
L'occasion d'échanges passionnants et enrichissants sur nos expériences de voyage ou sur tout un tas d'autres sujets !
Après une centaine de jours de voyage, cela fait quand même du bien de se "sociabiliser" à nouveau et de se faire de nouveaux potes 😊
Un plaisir aussi d'apprendre à connaître les mahouts qui travaillent et vivent au refuge. La barrière de la langue est présente puisqu'ils ne parlent pas anglais, mais des sourires et regards suffisent à faire passer des messages. On a eu également la chance de réveillonner avec eux et leurs familles le 31 décembre en partageant la traditionnelle "Mu Khrata", une sorte de pierrade/barbecue thaïlandaise.
Vous l'avez compris, cette semaine a été une expérience incroyable qui restera parmi les principaux temps forts du voyage. On a tout aimé, que ce soit les éléphants, la vie en collectivité, le lieu, le fait de se poser un peu à un même endroit quelques jours, et la fameuse nourriture de Mama qui à elle seule vaut le détour !
On en ressort plein de souvenirs mémorables, et avec une forte sympathie pour ces animaux qu'on ne connaissait pas du tout avant de venir.
On ne sait pas encore si on reviendra un jour en Thaïlande, mais si c'est le cas, nous n'hésiterons pas une seule seconde à revenir faire un coucou aux éléphants et à Mama 😘
C'est émus et un peu "désorientés" que nous sommes partis le dernier jour après le déjeuner découvrir la ville de Kanchanaburi et ses environs. RDV dans le prochain article 😊
Adresses et conseils(le cours du Thai baht fluctuant, nous préférons indiquer les prix en euro ou en dollars. Au moment de notre séjour, 100 THB valaient environ 2,64€)
- Séjour :
- Vous l'avez compris, on recommande à 100% Baan Mama à Kanchanaburi ! Tout est décrit sur le site → https://baanmama.com/. La semaine d'éco-volontariat (en théorie 5 jours/6 nuits, pour nous c'était pas loin de 7 jours/6 nuits 😋) revient à 6000 bath par personne, c'est à dire un peu moins de 160€, ce qui reste très raisonnable compte tenu des prestations (pension complète) et du prix des autres refuges, ne serait-ce qu'à la journée ! Et on mange trèèèèèès trèèèèèès bien !!!
2 commentaire(s)
Merci pour ce récit très détaillé.
RépondreSupprimerJe comprends mieux certaines choses maintenant ��.notamment concernant l'utilisation des chaînes.
Vous me donnez vraiment envie d'y aller.
Hâte de suivre la suite de votre voyage, j'avais hésité à aller à Kanchanaburi lors de mon premier séjour en Thaïlande.
Merci de nous faire voyager avec vous.
Merci 🥰🥰 Si vous avez l'occasion vraiment n'hésitez pas ça en vaut vraiment la peine 😍
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