Bolivie / Partie 6 : Sajama et l'Acotango
mai 03, 2022Bon… comment rejoindre notre prochaine destination, le Parc national de Sajama ? C’est un peu la question que se posent les rares voyageurs souhaitant visiter cette destination, et on ne peut pas dire que l’itinéraire pour y arriver soit bien documenté !
La
première étape consiste à attraper un moyen de transport qui passe par le
village de Patacamaya. Direction alors le terminal de bus du centre de La Paz,
l’objectif étant de monter dans un véhicule direction Oruro, une des
principales villes du pays (la route pour Oruro passant par Patacamaya !).
On
retrouve l’efficacité des gares routières d’Amérique latine qu’on adore
tellement : à 8h12 on arrive devant la gare, à 8h13 on entend une femme crier “ORURO
ORURO ORUROOOOOOO”, à 8h14 nos billets sont achetés, à 8h15 on est dans le bus,
et à 8h30 on part !
On met
bien deux heures à sortir de l’agglomération de La Paz / El Alto. Les arrêts
sont fréquents pour embarquer du monde en route, et les mamas présentes à bord
en profitent pour passer commande de poulet, de patates et de fruits à travers
la fenêtre aux “caseras” tenant leur stand le long de la route.
Une fois la tentaculaire agglomération quittée, on rejoint en à peine une heure Patacamaya. Après avoir intensivement frappé à la porte du conducteur, il nous libère sur le bord de l’autoroute.
Place
alors à l’étape 2 : traverser le village sur environ 1 km pour aller voir si
“le collectivo qui part entre 10h et 13h normalement tous les jours pour
Sajama” est bien là. Coup de bol : oui ! On “réserve” deux sièges et on file
avaler un poulet dans un petit resto, où l’amabilité de la serveuse est à la
hauteur du charme de Patacamaya…
À 12h30,
il est temps de prendre la route. Nous ne sommes aujourd’hui que six touristes
à rejoindre ce parc méconnu. Alors qu’on pensait rouler au milieu du désert,
les trois heures de trajet passent finalement vite au milieu de paysages variés.
On constate aussi que la route est loin d’être désertique, croisant de nombreux
hameaux et élevages de lamas.
Sous nos
yeux, le géant Sajama, volcan éteint haut de 6542 mètres, se montre tout au
long de la route et en impose avec son cratère recouvert de neige.
Une fois
l’inscription à l’entrée du parc effectuée, avec en ligne de mire à quelques
kilomètres le poste frontière chilien, on débarque au cœur du petit village de
Sajama autour de 15h30.
Nous
sommes ici à environ 4250 mètres d’altitude. Le village et les hameaux
l’entourant (70 familles au total) vivent notamment de l’élevage de lamas
(viande) et alpagas (viande et laine), et de la culture du quinoa. Le cadre
exceptionnel dans lequel ils habitent, entre lagunes, volcans, geysers et
sources thermales, le Parc national de Sajama, est inscrit à l’UNESCO depuis
2013. Il s’agit aussi de la plus ancienne réserve protégée de Bolivie.
Après
avoir récupéré notre chambre dans notre petite auberge (où nous sommes en ce
mercredi les seuls clients, pas plus d’une vingtaine de voyageurs grand maximum
doivent séjourner en même temps que nous dans les quelques auberges que compte
le village), nous grimpons au Monte Cielo à quelques kilomètres de là. Une
montée un peu éprouvante, l’oxygène étant rare, avec un bon dénivelé ! Après à
peine 2 km de marche nous arrivons au sommet à 4555 mètres d’altitude, et nous
pouvons admirer le panorama sur le village et ses alentours, avec le Chili en
toile de fond.
Place à
la redescente puis à un dîner bien généreux servi par notre hôte Ana, avant
de filer nous mettre au chaud sous la couette. Si les températures sont assez
chaudes en journée, sous le soleil, autour de 20 degrés, elles dégringolent et
sont négatives la nuit ❄.
Après
une nuit bien fraîche, et un petit déjeuner très très copieux, on reprend la
marche avec un objectif ambitieux pour notre deuxième jour sur place : le
Huisalla qui culmine à 5053 mètres !
Seulement
une dizaine de kilomètres en aller/retour, mais 800 mètres de dénivelé positif
qui mettent les organismes à rude épreuve à cette altitude. On s’essouffle vite,
mais on atteint tout de même en un peu plus de deux heures la cime du sommet.
Le chemin étant très accidenté, Maëlle jette l’éponge autour des 4800 mètres,
ayant encore une cheville douloureuse depuis le Guatemala. Thomas se donne le
défi d’atteindre le sommet, mais le chemin, ou plutôt l’absence de chemin,
devient bien trop dangereux passé les 4950 mètres. Par mesure de sécurité,
place à une redescente en mode “ski/sur les fesses“ entre deux avalanches de
pierres ! Heureusement, le panorama est à la hauteur de l’effort.
Une fois
réunis tous les deux, on se dit que c’était un peu une folie de se séparer
ainsi à cette altitude. Entre les risques de malaise (ou pire encore…) liés à
l’altitude, et aux risques d’accidents sur un tel terrain… On ne recommencera
plus !
À la
frustration du sommet manqué de peu s’ajoute la mauvaise surprise de constater
que la gourde était mal fermée dans le sac à dos, et que de nombreux papiers
sont trempés… rien de trop dramatique non plus, ouf (le permis international
notamment est sauvé) !
Il ne
nous suffit qu’une grosse heure pour rejoindre Sajama. On profite de notre
après-midi au soleil sur la terrasse de l’hôtel, avant de se coucher tôt après
un dîner avancé à 18 heures, car le lendemain…
… le
réveil sonne à 1h du matin, une grande journée s’annonce ! Après avoir avalé
une boisson chaude et nous être équipés, nous prenons la route à bord d’un 4x4
avec Mario, qui tient l’auberge avec Ana, et qui est guide de haute montagne.
On quitte le parc Sajama et on prend la route de la frontière chilienne. Des
centaines de camions attendant à la fois leurs résultats de tests PCR, et
l’ouverture du poste frontière, pour rejoindre le Chili. La file est
impressionnante… tout devrait prochainement être beaucoup plus fluide puisqu’au
premier mai le Chili ne demandera plus de PCR.
Peu
avant la sortie de la Bolivie, on bifurque sur une piste qui nous fait grimper
progressivement jusqu’aux 5300 mètres d’altitude. Le 4x4 fatigue, et Mario doit
régulièrement faire une pause pour le bien du moteur. On en profite pour
admirer la voie lactée, alors que seule une poignée de lumières se dégagent
dans les environs (quelques villages miniers).
On
arrive finalement à 4h du matin à notre point de départ. On laisse le 4x4, on
enfile gants, bonnets et veste, et en route ! L’objectif est de rejoindre le
sommet du volcan Acotango, sur la frontière chilienne, à 6052 mètres
d’altitude.
Grimper
un 6000 mètres, c’est un défi qui trotte dans notre tête (enfin, surtout celle
de Thomas !) depuis le passage du Thorong La Pass, au Népal, en novembre
dernier. Aujourd’hui, c’est enfin le jour J ! Nous avons choisi ce volcan en
particulier à la fois pour sa relative “accessibilité” (on peut le grimper en
une journée, pour un prix très raisonnable, sans avoir de compétences
particulières en alpinisme), et pour son côté très “confidentiel”
(contrairement à certains 6000m très “touristiques” et fréquentés).
Le
démarrage de la marche, à la frontale, est un véritable fiasco, puisqu’au bout
de quelques centaines de mètres Maëlle est prise de violentes nausées… A cette
altitude (environ 5300 mètres), il y a moins de 50% d’oxygène de disponible
dans l’air comparé au niveau de la mer, et ça ne pardonne pas.
Heureusement,
après quelques minutes de repos, on peut poursuivre : pas question d’abandonner
si tôt !
On
marche quelques kilomètres sur un faux plat assez facile, alors que la neige
recouvre très rapidement le sol, dans un rythme lent mais constant. Avant
d’arriver… au mur, alors que le soleil se lève et réchauffe l’atmosphère ! Après
avoir mis nos crampons, Mario décide de nous faire emprunter le chemin le plus
direct vers le sommet : une montée en pic, une côte qui doit dépasser aisément
les 50%. Le sommet paraît à la fois si proche et si loin, l’ascension est
lente, très lente. Maëlle souffre, Thomas a l’impression de parcourir un sprint
de 100 mètres à chaque pas. On effectue de très nombreuses pauses, on a du mal
à récupérer notre souffle (pas plus de 45% d’oxygène disponible à ce niveau).
Impossible de connaître la distance restante, mais l’application Maps.Me nous
permet de déterminer notre altitude en temps réel. 5600m, 5700m, 5800m, 5900m …
Passé ce seuil, l’ascension est éprouvante, nous n’avançons plus du tout. Les
corps lâchent, Mario décide alors de s’encorder avec Maëlle pour éviter une
chute qui pourrait la faire redescendre de quelques dizaines de mètres (et donc
nous faire perdre quelques… heures de progression !). Les lunettes de soleil de
Thomas se rompent en deux, alors que la réverbération du soleil est
éblouissante sur la neige, et peut être très très dangereuse pour les yeux.
Heureusement, quelques petits bouts de scotch plus tard nous pouvons repartir :
merci Super Mario ! On a chaud, on se déleste de nos vestes, et on
continue tant bien que mal en s’encourageant. 5925m, 5950m, 5975m… Le mental
tient à peu de choses, pas question d’abandonner si proche du but, alors que
Mario nous glisse des « courage » après nous avoir entendu nous le
répéter quelques centaines de fois !! On passe la barre des 6000m avec fierté,
mais il reste encore plusieurs dizaines de minutes de montée.
On
attend la crête avec soulagement, de là le paysage se dégage, et on peut
admirer côté chilien des lagunes, des déserts de sel et même des volcans en éruption
! Côté bolivien, on garde en ligne de vue depuis plusieurs heures les volcans
Sajama, Parinacota et Pomérapé. Mario nous annonce encore une grosse quinzaine
de minutes pour rejoindre le sommet à 6052 mètres, mais on sait au fond de nous
que cela sera plus long. Les derniers mètres sont interminables mais la récompense
est à la hauteur de l’effort ! Maëlle lâche quelques larmes et promet à Thomas
de ne plus jamais refaire ce genre de choses !!!
On
profite quelques minutes du panorama, heureux et fiers, mais tellement épuisés.
Il est 11h et nous avons mis près de 7 heures à grimper ce fameux sommet. Place
ensuite à la redescente, plus rapide puisqu’à 13 heures nous sommes à la
voiture ! On emprunte un chemin très direct, Mario et Thomas “skient”
littéralement avec leurs chaussures et leurs bâtons, pendant que Maëlle descend
tant bien que mal avec quelques “sessions luges” sur les fesses. La fatigue se
fait ressentir sur les dernières centaines de mètres pour Maëlle, Mario lui
prend la main pour assurer les derniers passages “casse gueule”, et c’est une véritable
libération de retrouver notre voiture pour retourner sur Sajama.
14h30,
de retour au logement, un seul mot d’ordre pour le reste de la journée : REPOS
!
Une
journée qui restera gravée dans nos mémoires, une fatigue extrême mais une
immense fierté. Thomas retentera bien un autre 6000m à l’occasion d’un autre
voyage, en revanche pour Maëlle c’est terminé 😊
On
partage nos aventures lors du repas du soir, l’auberge s’étant considérablement
remplie, avec notamment une famille de …. Nantais !
Alors que
Mario file se coucher pour se réveiller à …. minuit pour repartir faire
l’ascension d’un autre 6000m avec un nouveau groupe (quel fou !), nous
partons nous sur une belle nuit de douze heures de sommeil.
Le
lendemain est bien plus reposant, puisqu’on se contente de marcher un total de
12.5km pour rejoindre les thermes situées à l’extérieur du village. Une bonne
trempette dans une eau bien chaude, grâce au volcanisme de la région, devant un décor plutôt sympathique 😊. Même
si le retour se fait à marche forcée, l’orage menaçant au loin !
La
marche depuis le village est assez agréable et sans dénivelé. L’occasion de
croiser quelques hameaux et surtout pas mal de lamas !
On
profite aussi de cette journée détente pour, enfin, faire un petit tour du village
de Sajama. Bien mignon, même si malheureusement les tiendas ne disposent pas de
frigo, impossible de s’acheter une bière fraîche ☹
Après
une soirée passée avec la famille nantaise, nous repartons le lendemain
profiter de notre dernière journée à Sajama avec Maelis, une Martiniquaise,
après avoir bien traîné le matin au soleil sur la terrasse de l’auberge.
L’objectif
de la marche est de rejoindre des geysers, situés à près de 8 km du village.
Une belle petite rando, toujours au milieu des lamas et des volcans. Arrivés aux
geysers, on croise quelques familles de locaux qui profitent du dimanche pour
venir se promener, ou encore faire cuire un œuf dans les eaux chaudes (ou
plutôt bouillantes !), une tradition ici !
La
journée se termine autour d’une bière (pas fraîche, tant pis !) puis d’un
repas sur une table très internationale, entre Flamands, Israéliens et
Français ! Comme c'est la veille du 2 mai, férié en Bolivie, Mario & Ana sont en soirée à festoyer. Ainsi, c'est la petite Nicole, 11 ans seulement, qui gère seule avec une copine l'accueil et la cuisine pour la petite dizaine de clients : une maturité incroyable pour son âge !
On ne
traîne pas car le réveil est réglé sur 5 heures du matin, afin de nous diriger
vers, déjà, notre dernière étape bolivienne…
Sajama,
un vrai coup de cœur ! Entre sa quiétude, ses paysages
incroyables, ses 6000 mètres à grimper, ses lamas… on ne regrette pas notre
passage 😊. Et
c’est aussi un bon moyen pour faire baisser son budget quotidien dans le pays,
car on n’y dépense pas grand-chose !
(le cours du Bolivian Boliviano (BOB) fluctuant, nous préférons indiquer les prix en euro ou en dollars. Au moment de notre séjour, 10 BOB valaient environ 1,37€)
- Il y a quelques auberges sur Sajama, et une poignée de logements chez l’habitant. Nous recommandons sans hésiter la Posada Mario & Ana. On a bénéficié d’une chambre avec SDB privée (avec eau chaude plus ou moins fiable) pour 80 BOB (11.01€) la nuit. Il fait froid lorsque le soleil se couche, mais il y a de quoi se couvrir. L’auberge assure aussi les trois repas du jour, nous avons pris les petits déjeuners copieux à 15 BOB (2.06€) par personne et les dîners à 20 BOB (2.75€) par personne. Accueil impeccable, Ana, Mario, et Nicole – leur fille - sont adorables et au petit soin. Possibilité de demander à Mario de partager sa connexion internet en Wifi, et de laver son linge sur place. Ils peuvent assurer des transferts en voiture dans le parc.
Whatsapp d’Ana pour réserver : +591 74017189
- Rejoindre Sajama, c’est une petite expédition. La première étape est de rejoindre le village de Patacamaya. Depuis La Paz, il faut prendre un collectivo depuis le cimetière ou, notre option, un bus pour Oruro depuis le terminal de bus du centre-ville, et demander au chauffeur de vous déposer sur l’autoroute au niveau de Patacamaya. Compter 20 BOB (2.75€) le billet de bus, il en part toutes les 30 minutes environ. On recommande de prendre celui de 8h ou 8h30, compter environ 3h de trajet (dont 2h juste pour quitter l’agglomération La Paz/El Alto !). Si vous venez d’Oruro, c’est le même principe à l’envers : prendre un bus pour La Paz et descendre à Patacamaya 😊
Une fois à Patacamaya, trois options :
1) Un collectivo part normalement tous les jours vers Sajama (position indiquée sur Maps.Me). Il part entre 10h et 13h, quand il est plein… Nous sommes arrivés à 11h30 et nous avons pu prendre le collectivo à 12h30 (35 BOB – 4.77€ par personne), environ 3h de trajet. Il y a pas mal de petits comedors à Patacamaya pour manger un bout le midi en attendant ;
2) Sinon, il y a des collectivos qui vont à la frontière chilienne, à Tambo Quemado (position indiquée sur Maps.Me). Départ normalement toutes les heures, demander à descendre à l’entrée du parc Sajama et faire appeler un taxi pour vous avancer jusqu’au village (environ 10km de piste) ;
3) Dernière option : partager avec d’autres voyageurs un taxi privé qui vous déposera également à l’entrée du parc.
Pour info, il faut s’enregistrer à l’entrée du parc et payer 100 BOB (13.77€) par personne…. sauf si vous avez de la chance et que personne n’est à l’entrée !
- Autres :
- On recommande sans hésiter de partir avec Mario pour gravir un des 6000m accessibles depuis Sajama. Il y en a 4 : l’Acotango (6052m), le Parinacota (6380m), le Pomérapé (6248m) et le Sajama (6542m). Les trois premiers se grimpent en une journée, le prix est de 1500 BOB (205€) pour un groupe de deux personnes. Le dernier se grimpe sur trois jours, pour un prix supérieur. Outre son professionnalisme et sa gentillesse, l’avantage de partir avec Mario est aussi qu’il prête gratuitement tout le matériel nécessaire (contrairement aux autres guides du village) : chaussures, crampons, bâtons, gants, vestes…. Mario encourage, aide, est patient, et a à cœur d’amener tout le monde jusqu’au bout. Il aime bien aussi faire des petites blagues 😅
Whatsapp de Mario : +591 73727956
0 commentaire(s)